• L'affaire Mortara ou la haine des juifs par le vatican

     

     

     

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    L'affaire Mortara réveille la haine des Juifs

    L'Enlèvement (Marco Bellocchio, 2023)1er novembre 2023. Par une opportune coïncidence, en ces temps troublés marqués par un regain d’antisémitisme dans le monde, voilà que sort sur nos écrans une fresque historique qui raconte l’affaire Mortara et ses développements à l'origine de l'antisémitisme moderne. Sous le titre L’Enlèvement (Rapito), le film est l’œuvre du cinéaste Marco Belloccchio (83 ans), l’un des survivants de l’Âge d’or du cinéma italien.

     

    Dans une mise en scène soignée et somptueuse, sans laisser place à l’ennui, L’Enlèvement nous entraîne pendant un peu plus de deux heures dans l’Italie du Risorgimento. Le film nous fait vivre le drame personnel de la famille Mortara en lien étroit avec le contexte politique et international.

     

    En 1858, dans les États du pape, Edgardo, un enfant juif, est enlevé à ses parents pour recevoir une éducation catholique au motif qu’il aurait été secrètement baptisé dans les premiers mois de son existence par la bonne catholique de la famille. Il s’ensuit une campagne de presse qui secoue l’Italie et mobilise les milieux juifs dans toute l’Europe et aux États-Unis.

     

    En France, le journaliste catholique Louis Veuillot développe le soupçon d’un complot juif visant à mettre la main sur la presse comme sur la finance. L’historien Michel Winock, à la suite de quelques autres, y voit la naissance de l’antisémitisme moderne.

     

    C’est l’époque où règne en France Napoléon III (1851-1870). L’empereur des Français désire s’engager aux côtés des Italiens dans leur lutte pour l’unité de la péninsule et il rencontre à cet effet le Premier ministre piémontais Cavour à Plombières (Vosges), les 20 et 21 juillet 1858.

     

    Le rapt d'Edgardo Mortara, Moritz-Daniel Oppenheim, 1862, musée juif de la ville de Francfort-sur-le-Main.

     

    Un enfant enlevé à ses parents pour le salut de son âme

    Un mois plus tôt a débuté l’affaire Mortara. Le 23 juin 1858, une escouade de carabiniers se présente au domicile de Salomone Levi et Mariana Mortara, une famille de juifs aisés de Bologne, dans les États pontificaux. Ils demandent à voir les huit enfants du couple, dont les aînées ont onze ans et la plus jeune est encore au sein.

     

    Puis ils font savoir que le dénommé Edgardo (six ans) doit leur être confié pour être éduqué dans une institution catholique du fait qu’il aurait été baptisé du temps où il était nourrisson ! Arraché à ses parents, l’enfant est conduit à Rome, à l'hospice des catéchumènes, près de l'église de la Madone-des-Monts, où il retrouve d’autres enfants d’origine juive ou musulmane.

     

    Pie IX et ministres, Josep Galofre Coma, 1847, Château de Versailles. Agrandissement : Portrait de Pie IX, George Peter Alexander Healy, 1871, musée Pio Cristiano, Palais du Latran.Pendant ce temps, les parents, bouleversés, apprennent que les gendarmes ont été mandatés par l’inquisiteur de la ville, le dominicain Pier Gaetano Ferreti, qui représente la Sacrée Congrégation du Saint-Office, chargée de la défense de la doctrine catholique.

     

    Ils découvrent que, six ans plus tôt, leur ancienne servante, de confession catholique, voyant le nourrisson malade, avait pratiqué un baptême d’urgence (ondoiement) pour lui assurer le paradis ! Suite à des confidences tardives, son secret était arrivé aux oreilles de l’inquisiteur et celui-ci, ayant vérifié les dires de la servante, avait ordonné d’appliquer la loi romaine en soustrayant l’enfant à ses parents…

     

    L’administration pontificale se justifie en rappelant que :

    • L’ondoiement confirmé à Rome par un baptême en bonne et due forme a fait de l’enfant un chrétien irréfutable.

    • Par le baptême, l'Église a acquis sur lui « un droit supérieur à tout droit humain ».

    • La famille Mortara doit se conformer aux lois de l’État dont elle est l’hôte.

    • La famille Mortara a commis une faute en employant une bonne catholique, en violation d’une loi en vigueur dans les États pontificaux (et à vrai dire peu appliquée).

     

    Aux supplications qui lui viennent de toutes parts, le pape Pie IX lui-même en vient à  répondre par une formule rituelle héritée des premiers siècles de l’Église : « Non possumus », en d’autres termes, « Nous ne pouvons pas revenir sur une décision qui relève de l’ordre divin ».

     

    La famille Mortara et la petite communauté juive de Bologne ne l’entendent pas de cette oreille et alertent la synagogue d’Alexandrie (Piémont) ainsi que les communautés israélites d’Italie, de Belgique, d’Allemagne, de France et d’Angleterre

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